Pauline, coach, reçoit une nouvelle demande de coaching directement de la part de Juliette (payé par son entreprise).
L'entreprise est une sorte de start-up qui a démarré avec 7 personnes, dont Juliette, qui était là dès le début. La croissance a été forte et l'entreprise, c'est aujourd'hui 600 personnes.
Avant le COVID, Juliette manageait 4 services : la communication interne, la communication externe, la formation et le recrutement des profils digitaux. Elle était rattachée au fondateur
Et récemment Juliette, 37 ans, a fait un burn-out. Arrêt pendant 4 mois.
Depuis 6 mois elle est de retour avec un 4/5e thérapeutique.
Après son burn-out, elle n'est plus en charge que de la communication interne, avec 2 collaboratrices. Elle se plaint de ce redécoupage au fondateur, son N+1, qui lui répond : " Tu n'es pas faite pour la communication externe, regarde comment Marie se débrouille"
Peut-être que le fondateur a raison et pourtant elle est en colère. Elle constate d'ailleurs que 4 collègues qu'elle avait au démarrage sont devenues également malmenées.
En fait depuis son retour elle a une nouvelle manager, Hélène, intermédiaire avec le fondateur. Elle a proposé à Hélène de mettre en place un nouvel outil interne de communication. Du temps a passé. Enfin la manager s'y intéresse, et même plus, elle prend le lead pour intéresser les autres directions à cet outil.
Juliette constate qu'on ne lui demande pas son avis. Elle se sent blessée.
Puis la manager veut bien l'impliquer pour présenter l'outil, car il a maintenant été adopté.
Mais Juliette, coupée de tous les échanges de conception, a le sentiment de ne pas pouvoir faire utilement cette présentation.
Sa manager lui dit qu'elle a été placée là, entre Juliette et le fondateur, pour la protéger. Il est vrai que ce fondateur était cassant.
Elle se demande comment retrouver l'envie de s'engager. Ou encore doit-elle quitter l'entreprise, faute de motivation ?
Sa charge de travail lui semble faible. Elle a rencontré ses N +1 et N +2
Elle ne retrouve pas l'envie.
Cela dit elle ne supporte pas non plus le stress, la pression du timing, devoir courir.
Mais dans son travail elle dit : "Je ne sers à rien".
La communication interne est réputée moins essentielle, et de plus elle est compliquée maintenant que l'entreprise est divisée en 6 filiales.
Juliette voudrait être plus active. Elle indique souhaiter plus de responsabilités. On lui propose de contribuer à la RSE. Mais à peine entendu cela, elle se demande si ça va l'intéresser.
Aider à retrouver l'énergie ? Pauline, coach de Juliette, se sent "dans le brouillard".
Elle pense à ses approches classiques : Valoriser les atouts et les succès. Reformuler les motivations profondes, les besoins et les valeurs. Ne pas se comporter en victime (dans le fameux triangle). Reprendre contact avec les personnes positives.
Elle s'interroge car elle sent que ces approches ont tendance à "pousser" la personne.
Cependant, elle est en formation Systémique Palo Alto. Elle tente alors un nouveau raisonnement, paradoxal donc.
Juliette demande un coaching pour retrouver l'énergie et l'envie ?
Du point de vue systémique, elle a donc deux problèmes.
Problème 1 : elle a perdu son énergie.
Cela se comprend ! Sentiment de ne plus faire face, puis burn out, puis perte importante de responsabilités, et perte de niveau hiérarchique : c'est un deuil professionnel et il y a de quoi déprimer pendant quelques temps. C'est parfaitement normal.
Mais Juliette, engagée professionnellement, veut retrouver son énergie, sans doute sur un mode "auto-injonctif" du type "Je deviens ramollie, je deviens légume, je dois me bouger, je dois entreprendre, je dois avoir envie".
Et ça c'est le second problème, une sorte de reproche interne continu couplé d'un nouvel échec, car c'est trop tôt. Une sorte de double peine. C'est cela qui crée la plus grave perte d'énergie.
Quand la batterie est à plat, tirer encore dessus alors qu'elle n'est pas rechargée, c'est la "fusiller".
Le nouveau message adressé à Juliette va devenir :
"Juliette, vous souhaitez retrouver l'énergie et l'envie. Cela se comprend et c'est courageux. Cela dit, constatons que vous venez de traverser des épreuves très dures. N'importe qui en sortirait très affaibli. On peut même être étonné que vous ne soyez pas bien plus impactée. Alors ce n'est pas le moment de repartir au combat. C'est beaucoup trop tôt. Il faut laisser à l'organisme le temps de se réparer et de cicatriser. La meilleure idée pour l'instant c'est d'assurer juste l'essentiel de vos tâches, surtout pas plus".
On pourrait même ajouter : avez-vous pensé aux inconvénients de retrouver votre énergie ? Réfléchissez-y ...
"Éventuellement, avec un cahier personnel, vous pouvez choisir de clarifier vos idées sur les 5 années écoulées, faire la part des choses, comment vous avez été managée (ou sous-managée), les décisions que vous prendriez différemment, etc. Juste pour y voir clair tranquillement". Cela peut être une sécurité.
Ces deux types d'intervention n'ont qu'un but : stopper les auto-reproches, stopper les auto-injonctions de retrouver l'énergie, qui crispent et rigidifient la posture et empêchent l'adaptation souple.
Une fois libérée de ces auto-injonctions, la personne retrouve sa marge de manœuvre, sa liberté de choix. Elle se sent mieux. L'évolution naturelle de son énergie (et de ses décisions) pourra se faire, sans forçage.
Palo Alto offre une occasion unique, quand nous rencontrons un problème, d'entendre des messages totalement différents de tous les autres messages de l'environnement, tellement convergents et évidents. Des messages qui font voir autrement.